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regards sur / ce qu'il reste de - magali jourdan

magali jourdan

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regards sur / ce qu'il reste de

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lundi, novembre 5 2007

au parc


le corps étendu
dans l'herbe
seul
ouvert aux douces attentions
du vent effeuillé
un corps heureux
lumineux
fendu vers le soleil
seul au milieu des –
Larmes de joie
à l'écoute de ces notes
séchées par les rayons
d'automne
L'homme au loin
au regard indicible
est témoin
d'un instant de bonheur
l'herbe humide sous la veste
au bout des doigts
et les reflets argentés
des toiles d'araignées
Tout est calme, souriant
l'espace autour s'agrandit
et mon coeur sourit
aux couleurs chaudes de ce Moi
de novembre
Les arbres, en silence
entament une danse
discrète
et les corbeaux se font passagers
de leurs bras
La musique du parc
est la mienne
classique, en quatre mouvements
et mon regard sur lui
en est d'autant plus tendre

retour aux plaisirs simples
prendre le temps d'être
là où elle n'est pas : au coeur de –


mercredi, octobre 31 2007

système D


J'ai voulu m'en aller
Loin, à quelques kilomètres de là
A vélo
Je n'en avais pas.

J'ai trouvé des mots-roues
Une canne-guidon
Une chaîne en or pour emballer le tout
Et j'ai suivi vos traces
Ai ramassé ces petits bouts de rien
Que vous abandonniez

Trop –
Pas assez –
Jetés, laissés pour –
Traces de –

Ces quelques cheveux
Je les ai assemblés
Au sommet d'un bout de bois
Entourés d'un ruban de soie ocre
J'ai trempé mon pinceau
Dans vos yeux
Pour colorer la grisaille des cieux
Avec le manche
Je vous ai écrit
Des mots
Dans la neige
Ephémères, irréels

Et j'ai souri à la vie

jeudi, octobre 18 2007

hypnos


En chien de fusil
A plat ventre
Ou sur le dos
Je t'attends

Tu ne viens pas

Je refais le monde
Sans toi
Sous le regard noir de ta mère


mercredi, octobre 17 2007

Moi je



Tu as parlé
A ma place
Dans ce silence
J'ai construit
Regard après regard
Un Moi de la rupture

Le miroir s'est brisé
Je ne suis plus
Reflet de tes désirs
Mais vague souvenir
De tes emprises sur moi

A chaque perle de rire
C'est un mot lumineux
Que j'invente
Ton ABC je m'en libère
A chaque éclat de verre

J'ai engendré ma voix

Ma force je l'ai trouvée
Dans ta résistance
Mon chemin, je le suis
En rapport avec le tien
Mais de loin

jeudi, octobre 11 2007

espièglerie


Je croque le monde.
Le monde n'est pas à mes pieds,
il est dans mon estomac.
J'ai l'estomac dans les talons.

passage à niveau


J'ai pris le train avec toi.
Je suis descendue à la gare de -
Dans la précipitation, j'ai pris ta valise au lieu de la mienne.
Elle me semblait bien lourde. Je l'ai ouverte.
J'ai enfilé ton armure, ai combattu mon ombre avec ton sabre, ta charlotte de bain sur la tête.
J'ai mangé tes 12 tablettes de chocolat.
J'étais à l'étroit. J'étouffais, dans ton armure.
Alors j'ai goûté ton p'tit yaourt 0%.
Il était bien fade. Je l'ai saupoudré d'aspartam.
Je flottais, dans ton armure.
Je l'ai rangée. Dans ta valise.
J'ai chaussé des lunettes de soleil.
Et j'ai traversé, toute nue !

vendredi, octobre 5 2007

partition


On se soucie de son histoire
On la regarde. On la lit
On la relit. On la déchiffre
Pas à pas
On l'aime
ou parfois
on apprend à –
On apprivoise ses accords
ses passages compliqués

On l'écoute

On donne à entendre ses cadences
parfaites ou imparfaites
ses dissonances
ses inventions
à deux ou trois voix
On prend le temps
de l'avoir sous les doigts

On la ressent

On respecte son mouvement, son rythme
et sa tonalité
On bouleverse parfois son tempo

Expérimentation de -

Chaque pianiste la fait vibrer
différemment
lui donne une couleur
au diapason avec son coeur

Mais lui aussi est : une partition

samedi, septembre 29 2007

TGV 6127

Partir Quitter S'évader Fuir Avancer Marcher Bouger Cheminer Rouler Disparaître Partir S'évader Marcher Fuir Quitter Avancer Bouger Cheminer Rouler Disparaître Partir S'évader Bouger Fuir Rouler Avancer Marcher Quitter Cheminer Disparaître Partir Quitter Fuir Marcher Avancer S'évader Bouger Rouler Cheminer Disparaître Partir Quitter S'évader Avancer Cheminer Marcher Bouger Fuir Rouler Disparaître Partir Cheminer S'évader Avancer Marcher Bouger Fuir Quitter Rouler Disparaître Partir S'évader Quitter Marcher Fuir Bouger Avancer Rouler Cheminer Disparaître Partir Quitter Fuir S'évader Marcher Avancer Cheminer Bouger Rouler Disparaître Partir Avancer Quitter Rouler S'évader Marcher Fuir Bouger Cheminer Disparaître S'envoler pour –



Ne jamais arriver à destination.



Passer toute une vie dans ce bus,
ce train ou cet avion.
Croiser des gens.
Les rencontrer quelques instants,
sur le pont des errances…




***



Vagabond


Au coeur de feuillages
En quête d'identité
Le noir tombe sur le crissement des rails.
Étouffe le paysage –

fils, et masses sombres

Rencontre

Le destin à contresens.



***



Le voyageur s'est perdu

en chemin, vit une gare désaffectée

monta dans un train

aux couleurs de ses cieux

jeudi, septembre 27 2007

l'archer ancré en pleine mer


Les mots sont parfois des bouées
Dont en flèche s'éprend
Le nageur solitaire.

Poissons volants,
Ils passent,
Ne sont heureux que sur l'instant.

Difficile pour un coeur libre
De ne se pas suspendre
À ces saillies courtisanes.

L'écueil de ces flèches d'encre ?

Elles ne sont que poison si
Faute de clarté dans le geste
Elles manquent leur cible
Et touchent celle
Qu'elles ne pointent.

lundi, septembre 24 2007

pianissimo


Premier mouvement

Découvrir la partition

Mains hésitantes
Sur la peau d'ivoire
Attaque de la note
Sensible

Tremolo

Les doigts aériens
Effleurent le sol
Caressent le si le la
Le do : le faire résonner
De désirs insensés
Marteaux

Renversement

Cadence imparfaite
En mi, en moi
Résonance

Accord imprévu
Relâcher la lyre
Point d'orgue

rapprochement


Téléphone
Voix : elle chancelle
J'ai souffert de ton silence

A la lueur de 86 bougies
une plume s'est glissée
délicate
dans une frêle lézarde et –
le mur des secrets
lui a ouvert sa porte

Merci

Abandon
Confidence

Simplicité des aveux
bâillonnés hier encore
par l'hiver des liens du sang

Résistance zéro
Effacement des regrets
avant les souffles derniers

Sourire
des âmes réunies

Fin de l'omertà

vendredi, septembre 21 2007

franz



Silence :
Rêver une table d'harmonie
Réunir autour d'elle
Des coeurs, des mains
Des yeux et des esprits
Attaquer, pincer ou caresser
Ses cordes –
Altérer quelques touches d'ivoire


Absence :
Ressentir au creux des mains
Le manque
Urgence du désir
Croquer à travers doigts
Les sensations de celui qui –
Le corps plein du mal français
Se jeta seul
Étourdi de musique
À la rencontre de lui-même


Mutisme :
Abandon d'une vie sur une partition
Que je ne cesse de lire
Transpercée de vibrations éteintes
A transmettre, sans fin


Émoi :
Précision du doigté
Tension délicate
Suspension –
Au lever de la main
L'âme-artiste s'envole


Franz s'est endormi.

lundi, septembre 17 2007

antidote

Quand les mots
Désespoir, plainte, refroidir, dur
Immuablement
S'offrent à nos yeux
Pourquoi ne pas déplacer le regard ?
Juste à côté, eux :
Déshabiller, plaisant, refuge, durable.
Ne sont-ils pas plus séduisants ?

Pourquoi enfilons-nous
Chaque jour systématique
Les pans obscurs de l'histoire ?

Changeons de garde-mots

La vie sait être
Simple et douce
Arrêtons de la mettre
En cause – Nous seuls
Sommes coupables
Du chemin sur lequel
Nous pleurons.


Avec la complicité silencieuse de Robert Micro

vendredi, septembre 14 2007

bandouille et baisecul, diablog

En l'an de grasce inconnüy du XIV settenbre MMVII

- Parbleu ! mon amy, que faictes-vous en ceste meie fenestre ?
- Ma foy, une envy de douce heur m'a destourné de mon biel & doulz viage.
- Qu'ouïs-je ?
- Ce que vos loncques oreilletes ont daigné vous aporter, m'amie !
- Diantre ! Où ceste douce heur est donques celée ?
- Auray-je le couraige de vous le desvoiler…
- Osez, ma creele, vous estes fame de cueur.
- Si vostre voiz continue de la sorte, à presser ma vertu d'un doulz son de cloporte, je n'oseray mais, vous en dire d'avantage.
- Si fait, n'en parlons miete ! Viaz, passez-moy le dentifriss !
- Fichtre, vous connoyssez donques ce noviel eslixir ?
- Dame, voire, n'en faictes-vous poinct usaige ?
- Si que l'onguent est une trouvaïye que seulz les encusés se peusvent voir osfrir.
- Nenni ! Je connoys un apothicaire de for bonmarché.
- Auray-je l'ocasyon de vous y voir m'emener ?
- N'en feroy-je rien. Ma fame m'a tosjors desfendeü l'entremise.
- Que mirez-vous en moy, si ce n'est la mesprise !
- C'est que Nature m'a faict fol & espou d'une gueuse !
- Non ! Votr histoire, Diablotin, n'a de prise que sur vous & me garderay bien de n'en juger le sou !
- Ainsi soit-il, chascun le sçait, les infortunés ne sortent que la nuyct !
- L'heur sombre des ores mais en demeure d'yvrongnes.
- Entrejoygnons-nous donques à ce banquet !
- Estes-vous seüre, ma Dame, que vous souhaytez voirement vous y voir desmontrée ?
- Vous dictes vray. Cachons-nous derriesre ce fourrez, que nuz nous aperchoyve !
- Damoysiele, votre hardyesse m'apeüre. Si quelque Hun nous veoiyaict –
- Le manant en auray tot le chief tranchié !
- Dou vous vyennent ces mots que le myen ne sauroit tost saysyr ?
- J'entens ! Vostre rayson n'esgale pas vostre enbonpoinct.
- Ceste ignominie, ma foy, mesriteroit une bonne claqueüre en vostre chaste gueulle !
- Mais fayctes doncques ! Incontinent !
- Vos grandioses esmeuës ne cessent d'esveiller un mien courroux desja contry. Ne m'eschauffez plus guesre ou vos arriesre vont se trouver meurtryz !
- Cest incarnat syed à mervoille à vostre pasle vis. Comme il me syed, ma Dame, de vous voir eschaufer.
- Je vous pry novelement, de ne me poynt pester vos remonstrances au viaire !
- L'exiture de ma braguette tombe jusques à mes chausses.
- Votr inimityéz, à tous azars, m'endors descza de là en la cuysine du scavoir.
- Tresbien. Souppez y ! Peu me chaut !
- Le gras de vostre parolle me cuyst comme un faysan de basse cour. Mestez le chief bas à votr ardente espée, poynt m'est venüe l'heur du trespas.

Ces derniers dicts ne furent poynt esgourdyz : le posvre roy fut entrecoupész par la lamme de la donzelle en ire. A tout aleüre, le sangt & la viande desgoulinoient de ses roveles entraylles.


merci à bandouille d'avoir remonté le temps avec moi...

dimanche, septembre 9 2007

???


Qui montre (quoi) ?
Qui voit (quoi) ?
Qui donne à voir (quoi) ?
Qui regarde (quoi) ?

L'écriture passe par le don de soi. D'un côté ou de l'autre du livre.

L'encre ne coule pas à sens unique.

folie douce folie douce folie


Me suis assise sous un châtaignier.
Produit de la gravitation : un de ses fruits a succombé. A pris contact avec mon crâne. Y a écrit un gros cratère.
Des hirondelles, des clowns tristounes, d'amples gamins, des araignées. Tous, incertains, s'en sont enfuis, sur des ailes d'anges cristallines.

Me suis tordue vers le soleil. M'a dit : viens donc par là, ma belle. L'ai entendu, accompagné, jusqu'au seuil des murmures. En secret.
Enlacé de doux rais ivoirins, mon coeur métissé de rires tendres est resté là, calmé, serein.
Il est assez mûr pour apprendre : "Les failles sauvages dans mon appeau y ont séduit de fabuleux oiseaux."

Regard illuminé
par le reflet grenat des fanaux
j'erre sur les ombrages dorés
la tête en vrac
enluminée

Réveil
La coque est vide
L'arbre n'est plus à pain
La chaleur des rêves s'artiste
A deux mains

collection

J'ai acheté de drôles de boîtes chez un vieil antiquaire au sourire enjôleur.
Une boîte aux lettres,
une boîte de nuit,
une boîte à meuh et une boîte mail,
une boîte crânienne et de conserve,
une boîte postale,
une à outils.
Encore des boîtes... Qu'ai-je donc à y ranger ?
Qu'ai-je donc à éconduire ? Qu'ai-je donc à contenter ?
Qu'ai-je donc à contenir ?
Au hasard des pays,
je chine les beaux écrins / je remplis mes valises
de couleurs vives et flamboyantes, de sons cuivrés et harmonieux, de formes simples ou épurées, de valeurs rares ou peu précieuses.
J'y réunis, discrets, mes secrets dérisoires – des regards, des sourires, des gestes tendres et du plaisir.
J'y cache la voix qui fait du bien : des bouts de toimoirien.
Une histoire tendre s'écrit, entre ces bouts d'ailleurs et moi, au gré du souvenir exquis de ces escales – – –
Le temps se presse.
Enfile sa peau noire, me laisse seule
m'éveiller, aux lumières chaudes de la nuit.

vendredi, septembre 7 2007

La lente agonie de la mie de pain mastiquée par l’Edentée


Tout était dans le titre.




à mlle a. / en souvenir de ce repas

mercredi, septembre 5 2007

marocco


Débarquement de nuit, après l'avoir survolée une première fois. Tanger : m'y voici. L'odeur et l'humidité me font sentir que je suis étrangère à cette ville. Je ne la connais pas et la respecte déjà. Les yeux grands ouverts, je m'engouffre dans la petite camionnette aux rideaux ocres. Les poètes font office de gardes du corps, avant ceux du coeur. Chéchia sur la tête, les rires fatigués se mêlent à l'ivresse d'arriver dans cette ville mystérieuse qui ne m'a pas encore empoignée. L'homme de l'hôtel se débat pour éclairer une grande chambre sombre et réparer à coups de main une lampe déjà endormie. L'arrivée dans une ville étrangère est toujours particulière. Liée à des états de faits ou coïncidences. Traçant un chemin à travers des rues pleines de pas rouges colorés de blanc, s'ouvre la joie d'être là, à cet endroit précis du globe, à la porte de deux mondes.

Nuit.

La Lumineuse aux accents d'agrumes laisse entrevoir par la trouée des palmiers son immensité bleue que je n'ai jamais contemplée que depuis l'autre côté. Le soleil brûle déjà la rétine. J'aime cette ville alors que je n'en ai encore rien vu. Premiers pas dans les rues en travaux de Tanger. Je passe devant la terrasse du café où, je ne le sais pas encore, Beckett avait coutume de s'asseoir. Kawa ? 10 Dirhams. Plus loin : la fontaine et la porte d'entrée de la médina. Légumes, poulets, fromages à portée de main, épices. Et la criée où s'entassent poissons, marocains et espagnols aux regards bruns profonds. Retour à l'envoyeur : je me laisse libre de les laisser me faire exister à travers eux. Succession de petites boutiques qui défilent à pas lents, droits, évitant la glissade sur les débris de bouffe. Chants. L'étranger dans la langue se fond déjà en moi avant de prendre la route pour Tétouan. Douanes volantes à répétition ou marchandeurs de lampes défectueuses. Les vendeuses de fromages déambulent le long de la route pour nourrir les enfants qu'elles ont posé quelques mois ou années plus tôt. Les cordonniers quant à eux, posent pour la mémoire, la mienne, me confiant l'art de transmettre le leur, plus tard, dans une autre langue, la mienne, et les faire exister à mon tour dans leur propre histoire. Je marche à travers les ruelles de la médina aux côtés d'Ahmed, mon éphémère chevalier servant. Discret, il m'accompagne jusqu'à ce lieu inattendu où s'entassent des peaux de bêtes qui soufflent quelque chose que je ne sens pas, préférant respirer par les pores ces effluves nauséabondes, si prenantes. C'est à la limite du supportable mais je me plais à rester un moment à humer ces espaces rares que seuls les gens d'ici connaissent. Deux lampes rouges seront bientôt dans ma chambre, propageant un brin de lumière de Tétouan dans le paysage bolivien du dernier grand voyage. Plus tard viendront s'y ajouter des verres de thé à la menthe et quelques cornes de gazelle à partager avec ceux qui font sourire mon âme. Le soleil s'infiltre par la septième porte de la médina et le miel du briouat coule encore sensiblement dans ma gorge. Douane. Hôtel. Les jours fondent en un clin de babouche et les clichés n'arrêtent plus. La caméra tourne, toujours autour de la langue. Etrangère et toujours un chouya familière, à des kilomètres de la chambre dont je me faisais hier encore l'heureux chérubin. La musique résonne toujours plus fort dans les écouteurs, la rendant plus oppressante.

Dormir.

Se reposer entre deux oreillers de plumes blanches, tandis qu'au loin sifflent les moteurs épisodiques des petits taxis bleus. Les hommes se retournent au passage des bottes européennes et captent le regard noisette de la résistance. Désirée ? Ici : oui. Jamais plus que ce jour. C'est agréable, loin d'être oppressant, malgré l'insistance des regards de ceux qui flairent l'odeur des chaussures poussiéreuses pour leur proposer leurs services. Extinction des feux. J'ai hâte de pouvoir m'étonner, demain, à nouveau, du cadeau inouï de ce voyage insensé aux fenêtres de Gibraltar. Kassou est là pour guider les sons et les images qui se dispersent dans ma tête. Il parle et se questionne, tandis que mon cerveau un instant quitte ma tête pour se poser sur celle de l'autre. J'ouvre la porte et laisse s'envoler un éclat de rire qui file percer le silence des eaux. Ville entre deux rives. La mer. Le vent. Le sable assourdissant les vagues. La plage est aux oiseaux. Trois à quatre traits pour qu'on sache qu'ils sont là, pas loin, ou déjà plus. Des groupes se forment. Le foot. L'attroupement sur la butte pour écouter la police montée. Les hommes isolés sont une menace, beaucoup plus que dans la ville. Attendent mains dans les poches. Qu'ont-ils d'autre à faire ? Mater. Attendre. Ecouter. Pister. Marcher. Ne pas bouger. J'ai la sensation d'être une proie sur laquelle ces aigles en blue jean ne vont pas tarder à fondre. Mais la menace est rassurante. Contradiction. Les larmes montent quand l'absence surgit dans les bars, au coin des rues, dans les détails des gestes, sourires, regards ou mouvements des gens autour de moi. La solitude offre un espace de liberté où elle peut facilement s'exprimer. Le nez coule, les cris prennent soudain le pas sur le bruit du ressac derrière moi et le silence de l'homme debout à droite. Toujours là. Me regarde, bras croisés, avant que son regard ne prenne place au coeur des footballeurs. Il efface les traces sur le sable, tandis qu'au loin un autre homme bras croisés ne cesse de me toiser. Des gardiens plus menaçants qu'anges. Je dois m'envoler. Rejoindre le Grand Socco.
Tout bouge, tout chante et m'enchante.
Le retard est de coutume.
Chokran !


tanger 2007 © mj

mardi, septembre 4 2007

confessions d’un homme heureux - 24 juillet 2067


08:12
J'ai besoin d'air.

10:42
Museler un chien n'a jamais servi à rien d'autre que : l'empêcher de mordre. Le chien reste toujours chien et continue à grogner si ça lui chante, avec ou sans muselière. Croyez-vous que les griffes d'un chien ne puissent faire autant de dégâts que ses crocs ? Allez, ne soyez pas si crédules ! Essayez ! Empêchez quelqu'un que vous jugez trop hargneux de parler ! Cela ne le rendra que plus hargneux.

12:24
Ce matin je me suis réveillé, avec la sensation étrange d'un retournement. Quelque chose de profond. Les années passent, mais le temps est passé de compter les jours et les mois et les années qui s'égrainent.

15:06
Nina n'est pas encore rentrée.

16:58
Nous étions comme deux chats : indépendants et dépendants l'un de l'autre. De la présence de l'autre. Une présence sauvage, ponctuelle. Au gré de nos envies. Nous avons construit, lettre à lettre, un petit monde de mots. Et de silence. J'ai enfin goûté au plaisir d'être à deux dans le silence, sans en être gêné. Le silence à l'état brut, comme empreinte muette d'une envie d'être avec soi-même quelques instants, en présence de l'autre.

18:31
Mes voyages ont assouvi mon besoin de bouger, m'ont permis de ne pas tourner en rond éternellement. J'ai calmé ce lion en cage qui continue à y tourner même si le dresseur lui ouvre la porte. Pour rien au monde je ne voudrais retourner faire ce cirque. Tourner en rond me détruisait, m'empêchait d'affronter la vie, celle que je devais faire mienne sans que quelqu'un ne me la prescrive. C'est une position bien confortable que celle du fauve en cage. Il sort quand on le lui ordonne. Il fait son numéro jusqu'à ce qu'on lui dise que c'est terminé. Et il retourne dans sa geôle. Jamais il n'a à prendre de décisions. Jamais il n'a à se confronter à ses propres désirs puisqu'on les lui dicte. Mais à force de les entendre, il finit par les faire siens, et peu à peu le fauve n'en est plus un.

20:48
Je me nourris des petits détails de la vie. Des petits événements qui surgissent au coin d'une rue. À la radio. Dans le café d'en face. Je suis un voleur de détails.

21:16
Les gens nous trouvaient « assortis ». Comme deux vêtements qui, sans pour autant être collés l'un à l'autre dans la penderie, semblent évidemment faits pour être portés ensemble. Nous étions deux vêtements avec une histoire commune et deux histoires séparées. Elle avait son travail, j'avais le mien. J'avais mes amis, elle avait les siens et parfois nous rassemblions tout ce petit monde le temps d'une soirée pleine de rires.

22:22
J'attrape chaque jour, depuis près de soixante ans, les miettes que laissent tomber les gens de leur bouche, de leur être ou de leurs relations, et les rassemble en un énorme gâteau de vie.

23:50
Depuis la fenêtre je pourrais presque la voir arriver si je me penchais un peu. Mais j'ai toujours autant le vertige et faire le guet, accoudé à la rambarde du balcon, n'est plus de mon âge. Nina n'est pas de ces femmes qui partent un matin et ne reviennent pas.

00:43
La lumière s'est éteinte.

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